Les disparues d’Amérique centrale

L’Amérique centrale, Camilla Panhard la découvre alors qu’elle n’a que vingt ans. C’est le coup de cœur. Devenue journaliste, elle décide d’y retourner. C’est un lieu de disparition qu’elle découvre, une région où la vie ne vaut rien. Des centaines de femmes disparaissent sans laisser de trace. Camilla Panhard décide alors de partager la vie des femmes migrantes centraméricaines. Un voyage de cinq ans qui s’achève au Mexique où les femmes vivent dans la peur d’être enlevées.

De ces disparues, véritables marchandises pour les passeurs, les gangs, les cartels, les journaux font peu de cas. Quant aux enquêtes policières, elles sont inexistantes. Pour leur redonner une voix, des gestes, un visage, Camilla Panhard leur consacre un récit puissant No Women’s land. L’occasion aussi de rappeler que le féminicide demeure un fléau en Amérique centrale.

Amérique centrale : la longue traversée des migrantes

« Ainsi commença notre traversée : sans argent, avec de la violence », Yohanna, 27 ans, Guatemala City. Comme Yohanna, elles sont nombreuses à fuir le Honduras, le Guatemala ou le Salvador, espérant échapper à la pauvreté et à la violence. Camilla Panhard a rencontré ces migrantes dans les refuges de la route migratoire ; beaucoup ont moins de vingt ans. Elles ont accepté de témoigner pour celles qui ont disparu, kidnappées, vendues, assassinées. Elles nous racontent leur traversée clandestine, la peur, les viols, les braquages…

Véritables proies pour les passeurs et les cartels, elles rêvent de franchir la frontière mexicaine simplement pour pouvoir « donner à leurs enfants des études en héritage, qu’ils aient au moins trois repas par jour, qu’ils ne souffrent pas autant… »

Mexique : vivre la peur au ventre

Camilla Panhard s’est rendue ensuite au nord-est du Mexique et à Mexico. Les cartels terrorisent la population ; là-bas, on vit la peur au ventre. Accrochées sur des poteaux électriques, des portraits de disparues, triste écho aux disparues de Ciudad Juarez. La journaliste a même rencontré des écolières mexicaines terrorisées à l’idée de se faire embarquer sur leur trajet. « Tu as peur de sortir de chez toi car tu ne sais pas si tu reviendras…  », raconte Tania, élève au lycée Pancho Villa à Mexico.

Le livre de Camilla Panhard est émouvant, choquant. Reste en mémoire les destins brisés des femmes migrantes, des écolières kidnappées, des mères qui se battent pour retrouver leurs filles. No women’s land a reçu le prix spécial « coup de coeur » décerné par l’ESJ.

Camilla Panhard, No women’s land, Les arènes, janvier 2016.

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